Oui c’est vrai, (NØ) a complètement abandonné le blog depuis quelques mois… Trop de travail, trop de voyages, trop d’émotions et de choses à faire, penser, organiser… Et surtout pas assez de temps… Mais voilà, c’est reparti !
(NØ) est de retour et pour se faire pardonner sa trop longue absence, elle vous invite à la maison et vous dévoile un peu de son quotidien, certains de ses secrets professonniels (peut-être comprendrez-vous un peu mieux le long silence…) et quelques petits détails intimes de son appartement.
Il s’agit en fait de la traduction d’un article paru il y a quelques mois en allemand sur le site ROOMBEEZ écrit par son amie Kathrin Leist (qui signe aussi toutes les photographies de l’article) à la suite d’une après-midi d’interview très agréable. Vous pouvez trouver l’original de l’article ici.

Un appartement-atelier parisien conçu comme une scène de théâtre, un espace de liberté.

Quand la scénographe-costumière Violaine Thel, alias (NØ), rentre de l’opéra et qu’un petit bonhomme japonais haut comme trois pommes (ou trois centimètres) se regarde dans le miroir de l’entrée, c’est que son compagnon a caché un message à l’intérieur.
C’est ainsi que l’on peut découvrir tout l’appartement-atelier en noir & blanc de l’artiste, qui, à travers les yeux des petits personnages qui peuplent cet univers, paraît bien plus spacieux que les cinquante mètres carrés qu’il mesure en réalité.

Bienvenu-e-s dans le monde de Violaine !

Mini figurines: Le Daruma ou Bodhidharma japonais, la mini poupée russe et la chouette rose

Le japonais tente de discuter avec une mini poupée russe et une chouette lorsqu’il ne joue pas le rôle de messager. « La chouette je l’ai cousue en Allemagne, le messager est japonais, la poupée, russe… Bref, les trois ne se comprennent pas, c’est un problème ! » m’explique Violaine. Deux petites figurines en bois reposant dans les trous de vis de la bibliothèque dégagent en effet plus d’harmonie. C’est peut-être parce qu’ils sont fiers de veiller sur le trésor de l’appartement : des centaines de livres. « Là où sont mes livres, là je me sens à la maison. » aujourd’hui c’est dans un appartement situé au dernier étage d’un immeuble haussmannien typiquement parisien et depuis la chambre on pourrait presque escalader les toits de Paris jusqu’à la Coupole du Printemps…

Lampe de bureau rouge style année 60

Dans le théâtre des minis-habitants se cache quelques secrets d’une histoire de famille, telle une magnifique « travailleuse » (souvenez-vous, (NØ) vous en parlait ici) en bois qui, du haut de ses quatre pieds compas, sert l’artiste dans son atelier. Un héritage de sa Mamie. De même qu’une lampe à pied des années 60 qui répand sa douce lumière sur un petit bus Volkswagen. « Ça a toujours été ma lampe, lorsque j’allais dormir chez ma grand-mère elle remplaçait la fragile lampe en cristal par celle-ci pour que je puisse sans risque l’allumer dès que j’en avais besoin. » Contre les murs sont appuyés des peintures et dessins, ébauches de ses décors. Au-dessus au contraire, seule la lumière habille les murs blancs.

Artiste Violaine Thel : Peinture et ébauche forêt cadre blanc

  Pourquoi dans votre appartement y-a-t-il autant de noir & blanc ?

Quand toute la journée au travail je suis entourée de couleurs et d’images, j’apprécie lorsque je rentre à la maison d’y trouver de « l’air et de la liberté », pour moi le noir & blanc est ce qui se rapproche le plus du «Rien ». Il y a tant de nuances et de tons de gris que la lumière met en scène, cela suffit comme décoration à côté de mon travail posé au sol. Je trouve cela plus intéressant de laisser découvrir une décoration un peu « discrète » comme les petits personnages qui racontent tant d’histoire plutôt que de recouvrir les murs de tableaux. Et finalement, entre le noir & blanc, il y a plein de petits points de couleurs qui sont importants, comme par exemple ces couronnes accrochées là ! (Le DIY est à découvrir ici…)

Alors ce masque de lapin n’est pas posé à côté de cette plante aux feuilles veloutées par hasard ?

Non, je ne laisse rien au hasard. Le masque de lapin est là, parce que mon papa et moi nous avons toujours appelé cette plante « oreilles de lapin ! » Parfois je m’inquiète même lorsqu’un des habitants n’est plus à sa place…

Plante verte Oreilles de Lapin et masque lapin de théatre

Si tout à une signification ici, suis-tu les règles du Feng-Shui pour aménager l’espace ?

En partie. À Paris il est très difficile de transcrire les règles du Feng-Shui exactement, les appartements sont si petits. On devrait par exemple diriger la tête de lit vers le nord pour mieux dormir, mais souvent le lit ne rentre dans la chambre que dans une seule position ! Mais je fais attention à certaines petites choses. Le miroir face à la fenêtre dans l’entrée, je l’ai placé là pour que les mauvais esprits qui voudraient entrer dans l’appartement par cette fenêtre prennent peur en voyant leur reflet et disparaissent !

Es-tu toi même toujours habillée en noir & blanc ?

Oui, en noir, c’est parfois utile si pendant une répétition je dois aller sur scène parce que quelque chose n’est pas à la bonne place et gêne le déroulement du jeu, en tant que scénographe-costumière c’est important pour moi d’être « invisible » dans les coulisses, c’est le code au théâtre et à l’opéra. Et puis c’est pratique, je ne réfléchis pas trop le matin, le noir ça va assez bien avec le noir !

Est-ce que tu peux m’en dire un peu plus sur ton parcours professionnel ?

J’ai d’abord fait des études de Design de Mode à Esmod à Paris, puis j’ai travaillé dans des bureaux de tendances et j’ai commencé à faire des costumes très vite. Ensuite j’ai repris des études de scénographie à Salzbourg. Et maintenant en plus de mon travail j’ai un blog de Déco/DIY !
Après mes études de stylisme, je n’ai pas eu envie d’entrer complètement dans l’industrie de la mode. Ce qui m’intéressait c’était le contenu plus que les formes, en plus je ne suis pas très « douée » pour les volumes, je me sens plus à l’aise avec les couleurs et les textiles et j’ai un bon feeling pour les mouvements de société. J’ai donc commencé à travailler pour des bureaux de tendances. Puis j’ai repris des études de sociologie… Parallèlement j’ai commencé à faire des costumes et des décors avec des groupes semi-amateurs et avec le temps je me suis rendu compte que l’opéra et le théâtre étaient plus importants pour moi que les tendances. Vivre avec un metteur en scène a sans doute joué un rôle dans ma décision d’arrêter de travailler à Paris et de reprendre des études à Salzbourg !
Pour le concours d’entrée j’ai modelé cette plante. Cela m’a pris une semaine entière pour qu’elle ressemble à la plante originale mais j’ai été admise pour passer le concours ! Depuis cette reproduction de plante a élu domicile dans un bocal de mon appartement.

Reproduction d'une plante modelée de couleur blanche

Pourquoi as-tu lancé le blog (NØ) NARRATIVE-LINES en 2015 et pourquoi ce nom ?

J’ai toujours bricolé des petites choses pour ma famille et mes amis. Un jour mon compagnon m’a dit que je devrais montrer ça. Je n’étais pas du tout convaincue que cela puisse intéresser quelqu’un et je ne voulais pas me mettre en avant, ma place est dans l’ombre, dans les coulisses ! C’est pourquoi j’ai créé un petit personnage, comme ceux qui peuplent mon lieu de vie, (NØ). Elle a un rapport étroit avec le théâtre, elle est là pour raconter des histoires. Quand on fait une esquisse, un croquis, une ébauche, un brouillon de quelque chose, les lignes que l’on trace sont parfois des lignes qui racontent quelque chose, et parfois elles ne mènent à rien. C’est de là que vient le nom du blog. Des lignes qui parfois sont narratives, parfois pas.
Sur ce blog je dessine, je colle, je couds, je brode plein de choses différentes. J’aime bien dessiner des petites choses fines avec mes stylos noirs. Mais je ne fais pas toujours des bidouilles compliquées, ces petits sachets-lapin sont hyper simples à réaliser, il suffit de découper et de coudre tout autour ! Et pour ceux et celles qui ne savent pas broder les yeux et le nez peuvent être dessinés avec un feutre ! (Venez faire un petit tour par là pour voir toutes les étapes de la réalisation !) Les petits dinos posés là seront sans doute les prochaines victimes d’un DIY, mais je ne sais pas encore quoi…

Trois petits dinosaures de couleur sur une boite en bois

Est-ce que tu penses l’aménagement de ton appartement de manière aussi conceptuelle que ton travail ?

Je ne réfléchi pas longtemps, quand je fais quelque chose ici, je suis un instinct. Quand nous avons visité l’appartement j’ai tout de suite trouvé la place de la bibliothèque. Dans tous les appartements dans lesquels j’ai vécu j’ai tout de suite su, dès la première visite, que je pourrais m’y sentir chez moi.
Pourquoi je ne vois ici pas de restes de décor comme objet de décoration ?

Je ne vis pas seule ici, et c’est déjà assez difficile à accepter pour mon compagnon que je sois très souvent absente (je travaille un peu partout en Europe et très ou trop rarement en France) pour ne pas en plus lui imposer les restes de mon travail dans le salon ! J’ai déjà une pièce de plus que lui qui me sert d’atelier, c’est assez injuste comme ça !

Que fais-tu dans ton atelier ?

Tout. C’est mon monde. Je construis mes maquettes, je dessine, je peins, je couds, je brode, je lis, j’écris, je fais les photos pour le blog… J’apprécie la solitude, le calme et les murs blancs propices à la création.

Comment fais-tu la différence entre ton métier de scénographe et ton métier de costumière ?

On pense différemment, à une autre échelle et on raconte les histoires avec des moyens différents. Sur scène je travaille un univers, un cosmos, je donne un cadre ou un contenant à une image, c’est une forme d’architecture. Avec les costumes je donne une autre forme de cadre aux personnages, un cadre plus ténu, plus fragile, je construits une architecture plus intime. C’est ce que j’aime le plus avec les costumes, la proximité, l’intimité avec les chanteurs et leur personnage. C’est très humain et j’apprends énormément.

Même avec les Divas difficiles ?

La plupart des Divas sont très sensibles, ouvertes et intéressantes ! Pas si compliquées qu’on le croit !

Pourquoi as-tu besoin d’autant de ciseaux différents que tu gardes dans ce pot de confiture ?

Ceux-là sont pour les petits découpages, ceux-là pour les papiers plus épais, ceux-ci pour les cartons, cette quatrième paire pour les tissus, les autres là coupent en zig-zag…

Ciseaux pour petits découpages, pour papiers plus épais, ciseaux cartons, tissus, ciseaux pour couper en zig-zag…

Pourquoi aimes-tu autant ces petites choses, ces petits détails ?

Ce qui m’intéresse au théâtre comme dans la vie ce sont les secrets cachés dans chaque chose. J’aime la chasse au trésor autant que le trésor lui-même. Chercher est mon occupation principale, et pour bien chercher il faut être attentif aux détails, aux petites choses cachées…

Daruma ou Bodhidharma Japonais se regarde dans le mirroir

Mais tu es perfectionniste. On pourrait dire que les personnages sont si loin du spectateur qu’on ne voit pas les petits détails.

Oui on peut dire que sur un costume les boutons par exemple ne sont pas si importants… Mais on ne conçoit pas des costumes seulement pour les spectateurs, on les conçoit aussi pour les chanteurs qui les portent, plus les costumes sont détaillés plus l’identification est facilitée. Et puis lorsqu’ils se retrouvent sur scène les chanteurs voient de très près le costume de l’autre personnage en face de lui avec lequel il doit interagir… Et il y a aussi des spectateurs au premier rang, et si quelqu’un assis là se pose la question de savoir pourquoi j’ai choisi ce bouton en particulier, alors je peux lui répondre !
Pour le décor c’est pareil, on ne construit pas seulement pour le spectateur, les chanteurs viennent habiter dans le lieu, les émotions et ce qui se passe pendant une soirée « arrivent » vraiment dans cet endroit.
Les détails du décor comme du costume aident à construire la fiction, que ce soit du côté du spectateur ou de celui de l’acteur.
Je travaille en ce moment sur une production de Norma avec Cécilia Bartoli, à la fin de son dernier air elle sort de scène complètement « détruite », ses émotions sont sincères et réelles.

Tu ne perds jamais patience ?

Je suis assez patiente (dans le travail…). Je peux recommencer dix fois la même chose si c’est nécessaire, mais cela ne signifie pas que je ne sois pas efficace. J’aime la perfection mais pas perdre mon temps !

Quand tu voyages, emmènes-tu des objets avec toi pour te sentir à la maison ?

J’emporte toujours quelques livres avec moi parce que je me sens chez moi là où sont mes livres, c’est aussi pour ça que la bibliothèque est aussi centrale dans l’appartement. Et j’emporte aussi toujours un petit carnet Moleskine ligné dans lequel j’écris et je dessine, et j’emmène aussi une poupée vieille comme le monde, c’est mon porte-bonheur, il faut que je l’emmène !

Mini Doudoux figurines en feutrine NUIGURUMI sur couverture grise

D’où viennent les meubles chez toi ?

La plupart viennent de Suède… Mais j’ai acheté une grande planche de bois épaisse, je l’ai faite couper en différents morceaux que j’ai placés un peu partout dans l’appartement, sur le meuble à chaussures de l’entrée, sur la machine à laver, sur le meuble de télévision… Les meubles ont l’air plus « nobles » et surtout ils vont mieux ensemble, ils ont un point commun.

Comment sais-tu ce qui se cache dans l’immense bric-à-brac de la grosse armoire de l’atelier ?

Je me souviens de presque tout ce que j’ai tenu dans ma main, cela n’arrive que très rarement que je rachète quelque chose par inadvertance. Mon magasin préféré à Paris c’est le BHV, on trouve tout au même endroit !

Materiel pour la couture et la broderie

Depuis combien de temps rassembles-tu ton assortiment de matériaux et ce qui compose ton atelier ?

Depuis environ 15 ans. Ces tréteaux et cette planche sont les éléments les plus anciens, ils sont mon bureau depuis que j’ai 19 ans, il y a six mois j’ai collé un film effet marbre dessus, depuis j’ai l’impression d’avoir un nouveau bureau, et voilà c’est reparti pour les 19 prochaines années !
Dans les pots de confiture en verre il y a des perles et des fils, dans les carnets noirs mes esquisses et brouillons, dans la grande armoire il y a les tissus, les papiers et cartons et plein d’autres petites choses… Quand mon compagnon me demande de la colle je le fais rire en lui demandant « de la colle pour quoi ? » je pense qu’avec mon tiroir à colles, je peux coller à peu près tout sur tout ! J’ai aussi des centaines de sortes de papiers différents. Je ne jette rien. Je conserve tout dans l’atelier.

Mon espace de vie doit au contraire rester le plus neutre possible, seuls les petits personnages ont le droit de s’y amuser.

Violaine / (NØ) remercie la talentueuse Kathrin Leist pour ce bel article et pour toutes les photos !

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