Le matin commence lentement, une petite tasse de café refroidit près d’un livre ouvert. Les doigts de (NØ) glissent doucement sur la page — non pas avec hâte, mais comme s’ils écoutaient. Ces derniers temps, (NØ) se laisse happer par d’anciens atlas botaniques. Des livres qui semblent porter, entre leurs pages, le silence d’un champ, la beauté tranquille d’un matin d’été, le calme apaisant d’une promenade de fin de journée.

L’un d’eux — The Concise British Flora in Colour — paraît presque trop beau pour être troublé. Chaque page est remplie de plantes dessinées à la main, peintes avec une patience bouleversante. On sent les années derrière l’encre. Son auteur, W. Keble Martin, a passé des décennies à dessiner d’après nature — des milliers d’espèces observées, rendues, nommées. Mais au-delà du regard scientifique, c’est la tendresse qui nous touche. L’intimité du regard.


Un autre livre, plus petit — The Small Atlas of Field Flowers — accompagne (NØ) sur le chemin de l’inspiration. Plus modeste, mais tout aussi délicat. Une collection d’illustrations fines, fragiles. Certaines presque effacées, d’autres encore vives. Ensemble, elles murmurent une poésie discrète, comme des pétales séchés glissés entre les pages.

Un petit fascicule est récemment venu se glisser dans cette constellation de lectures : Plantes magiques. Son format discret lui donne l’allure d’un carnet oublié. À l’intérieur, des herbes, racines et fleurs aux vertus anciennes — médicinales, symboliques, parfois mystérieuses. Ce n’est pas un manuel, mais une invitation à imaginer ce que les plantes savaient avant nous. Certaines pages ressemblent à des incantations botaniques : des phrases simples, mais chargées de mémoire. Ce livret ouvre une porte vers une autre relation aux végétaux — intuitive, presque chuchotée.

Il y a aussi The Complete Language of Flowers, un ouvrage dense et orné, où chaque plante, chaque fleur, se voit attribuer une signification. Le langage floral y devient code secret — amour silencieux, pardon, nostalgie, promesse. Souvenir d’une époque où offrir une fleur revenait à écrire une phrase sans mots. Ce livre est comme un dictionnaire intime. Parfois, un seul mot accroché à une fleur suffit à faire naître un motif ou une ambiance.

Enfin, posé tout près sur son bureau, il y a Winter Weed Finder. pour les chercheurs de trésors, comme (NØ)… Trouvé dans la librairie du MOMA, il contient tout un petit monde de graines fascinantes mais également le souvenir d’un beau voyage en amoureux à New York. Minuscule guide proposant de reconnaître les plantes qui persistent l’hiver, même sèches, même cachées. Ce livre parle de ce qui reste quand tout semble disparu. Les tiges creuses, les graines encore accrochées, les nervures d’un feuillage oublié. Il nous apprend à regarder autrement — à chercher la forme dans la disparition, la structure dans le silence végétal. C’est un livre de patience, d’observation, de lenteur.

Parfait matin tranquille…
Ces livres ne sont pas de simples références. Ce sont des rituels. Tourner une page devient un geste de révérence — chaque feuille, tige, corolle conservant sa forme, non seulement à l’encre, mais dans la mémoire. Ces formes me suivent. Elles reviennent dans mon carnet. En lignes légères. En couches superposées. Elles réapparaissent dans des lavis doux, dans une idée en train de naître : une nouvelle collection de motifs imprimés.

Cette série n’est pas une représentation littérale. Ce n’est pas un herbier. C’est comme une résonance. Un rythme subtil, né du simple fait de tenir ces livres, de les lire, de les laisser habiter le regard. De sentir le grain du papier. De voir la couleur s’y déposer lentement. Il y a dans tout cela un calme profond — comme si l’on dessinait un paysage qu’on n’a traversé qu’une seule fois, mais que tous les sens retiennent.
Et vous ? Quels paysages traversez-vous en ce moment ?
